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Morceau d'étoile

LA TOMBE D'HERODE

24 Février 2014 , Rédigé par LAURENT-PHILIPPE Publié dans #Spiritualité

L'exposition « Hérode le Grand : le dernier voyage du roi », inaugurée en février au Musée d'Israël, offre-t-elle à ses visiteurs toutes les garanties de rigueur scientifique ? Plus importante manifestation archéologique jamais organisée par l'Etat juif, son intérêt n'est pas contesté, mais sa pièce maîtresse l'est : la reconstitution du mausolée de l'ancien roi de Judée, sur le modèle de la tombe dévoilée triomphalement par Ehoud Netzer, en mai 2007, sur les pentes de l'Hérodion, ce gigantesque tumulus situé au sud-est de Jérusalem.

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A l'époque, cette découverte, qui avait été la quête personnelle de l'archéologue israélien pendant quarante ans, avait été saluée comme un événement. Or, aujourd'hui, le doute grandit sur l'authenticité du tombeau de l'une des plus grandes figures historiques de l'histoire judéo-romaine. L'archéologue israélien Joseph Patrich, qui remet en cause cette découverte, n'a rien d'un iconoclaste : tout comme l'était Netzer (mort en 2010), il est professeur d'archéologie à l'Université hébraïque de Jérusalem.

Il fait part de son « profond respect » pour celui qui fut son professeur : « J'enseigne à mes étudiants tout ce que nous devons à Netzer s'agissant de la connaissance de l'architecture hérodienne. Il a été un très grand archéologue, et sa contribution est considérable. Mais, en ce qui concerne la tombe d'Hérode, il avait tort. Dans le cas inverse, cela contredirait tous les enseignements sur l'architecture hérodienne qui nous viennent de Netzer lui-même. »

Avec son collègue Benjamin Arubas, le professeur Patrich a jeté un pavé dans la mare lors d'un récent colloque à Jérusalem. Depuis, il assure avoir rencontré dans la communauté archéologique « un sentiment de soulagement », une manière de dire que beaucoup avaient des doutes sans oser les exprimer.

INCOHÉRENCES

Le point central de son argumentation ? Les dimensions du mausolée trouvé par Netzer ne cadrent pas avec ce que l'on sait du roi mégalomane qu'était Hérode. Ce mausolée, ainsi que le sarcophage, souligne-t-il, sont bien trop modestes par rapport à ceux d'autres figures historiques auxquelles Hérode se comparait, comme César et Alexandre Le Grand.

Joseph Patrich estime inconcevable qu'après avoir fait construire des forteresses et des palais monumentaux, Hérode « se soit contenté d'une tombe aussi sobre pour lui-même ». Il souligne d'autres incohérences, comme l'absence d'une vaste cour et d'une entrée susceptibles d'accueillir les milliers de gens qui, selon l'historien judéen Flavius Josèphe, ont suivi son cortège funèbre, et surtout la localisation du mausolée, non relié aux principaux édifices du palais situés au sommet de l'Hérodion.

Sans compter une disposition bizarre, qui aurait nécessité de détruire une citerne d'eau pour construire l'escalier menant à la tombe. « Hérode, ce maître en architecture, aurait construit ce monument d'une manière aussi maladroite ? », insiste M. Patrich. Pour l'archéologue, la tombe de Netzer « appartient à un projet de construction différent, une phase antérieure des projets d'Hérode pour l'Hérodium ». Ses doutes sont partagés par Jean-Sylvain Caillou, expert à l'Ecole biblique et archéologique française de Jérusalem.

Selon lui, la tombe dévoilée par Netzer pourrait être celle « d'un tombeau royal, par exemple, celle d'un membre de la famille d' Hérode, mais pas du roi. Ce serait absurde, ajoute l'archéologue français, que celui-ci ait choisi pour lui-même une toute petite tombe en bas du tumulus, alors que toute sa symbolique voudrait qu'il soit enterré au sommet de l'Hérodion ». Joseph Patrich est de cet avis. Tout porte donc à croire que le mystère de la tombe d'Hérode reste entier.

Les fouilles se poursuivent à l'Hérodion, et peut-être donneront-elles lieu à une découverte indiscutable. En attendant, Joseph Patrich n'est pas mécontent de constater que la plupart des experts préfèrent désormais écrire les mots « tombe d'Hérode » avec des guillemets…...

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